L’ampleur du phénomène

Mis à jour le 15/07/2020

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En 2000, pour la première fois en France une enquête statistique a permis de mesurer la gravité des faits : près d’1 femme sur 10 a déclaré avoir été victime de violences conjugales (l’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (ENVEFF)).

Cette enquête a mis en évidence la présence de ces violences dans tous les milieux sociaux, l’ampleur du silence et l’occultation des violences subies très majoritairement par des femmes au sein des couples.

L’importance de ces violences n’a cessé de se confirmer depuis à travers différentes sources d’informations, d’évaluation et de recensement de données [1]

Ainsi, en 2017 :

  • 210 000 femmes majeures déclarent avoir été victimes de violences physiques et/ou sexuelles par leur conjoint ou ex-conjoint sur une année
  • 3 sur 4 déclarent avoir subi des faits répétés
  • 8 sur 10 déclarent avoir été également soumises à des atteintes psychologiques et/ou des agressions verbales
  • Moins d’1 femme sur 5 déclare avoir déposé plainte
  • Près de la moitié des victimes n’a fait aucune démarche auprès d’un.e professionel.le ou d’une association
  • 88 % des victimes de violences commises par leur partenaire sont des femmes
  • Sur les 16 femmes ayant tué leur conjoint officiel, au moins 11, soit 69 %, étaient victimes de violences au sein du couple.
  • 96 % des personnes condamnées pour des faits de violences entre partenaires sont des hommes.
  • Sur 25 enfants tués, 11 l’ont été avec leur mère par leur père, 14 sans que l’autre parent ne soit tué ; 109 enfants sont devenus orphelins.
  • 47 auteurs se sont suicidés.
  • La moitié des femmes tuées par leur (ex)-conjoint étaient des victimes connues, soit par les forces de l’ordre, soit par leur entourage, de violences antérieures de la part de l’auteur de l’homicide.

[1] La Lettre de l’Observatoire national des violences faites aux femmes, n°13, novembre 2018.

En 2017, le recensement des homicides au sein du couple en France a établi qu’une femme décède tous les 3 jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint.

En 2014, le coût économique des violences s’est élevé à 3,6 milliards d’euros.

Sans nier l’existence d’une violence conjugale subie par les hommes, il convient de souligner que la majorité des victimes de violences au sein du couple sont des femmes et que la grande majorité de ces faits de violences est imputable aux hommes, ainsi qu’en attestent les chiffres ci-dessus.

Le phénomène concerne aussi les couples homosexuels.Au vu des statistiques et pour faciliter la lecture de ce guide, nous avons fait le choix de parler des victimes au féminin et des auteurs au masculin. 

REMARQUE METHODOLOGIQUE

Au vu des statistiques et pour faciliter la lecture de ce guide, nous avons fait le choix de parler des victimes au féminin et des auteurs au masculin.   

Au plan international, l’ONU a engagé les États membres signataires de la convention CEDEF/CEDAW, Convention pour l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes, à rendre compte régulièrement des progrès des législations et des efforts mis en œuvre pour lutter contre ces violences.

L’Europe a posé un cadre de valeurs et de méthodologie dans la lutte contre les violences faites aux femmes et notamment les violences au sein du couple. La convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe, adoptée en 2011 et ratifiée par la France le 4 juillet 2014, constitue le premier instrument européen posant une base légale en vue de prévenir les violences faites aux femmes, de protéger les victimes et de punir les agresseurs. En érigeant ces standards minimums, la convention apporte à cette occasion un éclairage sur certaines notions : les violences au sein de la famille s’entendent indépendamment du fait que l’auteur partage ou ait partagé le domicile de la victime ; elle recommande aussi, dans la mesure du possible d’éviter la remise en présence des victimes et des auteurs.

En France, toutes les formes de violences verbales, physiques, psychologiques, sexuelles, économiques commises par un conjoint, concubin, partenaire lié par un Pacs ou un ancien conjoint, concubin ou partenaire sont INTERDITES et PUNIES par la loi. Elles sont constitutives de délits, voire de crimes (viols, homicides).

 Ces dernières années, les pouvoirs publics ont apporté des réponses à la fois législatives et institutionnelles. À de nombreuses reprises, le législateur a conforté la reconnaissance de ces violences, outillé la politique pénale en la matière et installé de nouveaux dispositifs de protection des victimes.

Par ailleurs, tous les 3 ans depuis 2005, les plans interministériels de lutte contre les violences faites aux femmes encadrent et facilitent la mise en œuvre de ces avancées.

En 2012 la MIPROF, Mission Interministérielle de Protection des Femmes et de lutte contre la traite des êtres humains a été créée. Elle est chargée de rassembler, d’analyser et de diffuser les données et informations relatives aux violences faites aux femmes, de favoriser l’animation locale de la politique de protection des femmes et de définir des plans de sensibilisation et de formation des professionnels. Enfin, elle assure la coordination nationale de la lutte contre la traite des êtres humains.

A CONSULTER

Les travaux, les préconisations ainsi que les outils de formation créés par la MIPROF sont téléchargeables sur le site :

stop-violences-femmes.gouv.fr

Ce site comporte un volet à destination des professionnel.le.s et un volet pour le public doté d’un onglet de fermeture rapide et non traçable.

1992 : Loi du 22 juillet (réforme du code pénal). La qualité du conjoint de la victime constitue une circonstance aggravante de l’infraction commise.

2001 : Loi du 15 novembre. Permet à la victime comme aux témoins de déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie.

2004 : Loi du 26 mai. Autorise le JAF à statuer en urgence sur l’attribution du domicile conjugal et à décider de l’éloignement du conjoint violent dès les premiers actes de violences et ce, avant le déclenchement de la procédure de divorce.

2005 : Loi du 12 décembre. Prévoit l’éloignement de l’auteur des violences du domicile à tous les stades de la procédure devant les juridictions répressives, ainsi qu’une prise en charge sanitaire, sociale et psychologique.

2006 : Loi du 4 avril. Extension du champ d’application de la circonstance aggravante à de nouveaux auteurs (pacsé, ex) et à de nouvelles infractions (meurtres, viols, agressions sexuelles). Facilitation de l’éloignement de l’auteur du domicile de la victime. Reconnaissance du viol entre époux ; alignement de l’âge légal du mariage des femmes sur celui des hommes (18 ans au lieu de 15).

2010 : Loi du 9 juillet. Ordonnance de protection dans les cas de violences au sein du couple ou de menaces de mariages forcés prévoyant des mesures d’attribution de la jouissance du domicile conjugal pour les enfants exposés aux violences. La loi instaure le port du bracelet électronique pour contrôler l’effectivité de la mesure d’éloignement du conjoint et des mesures spécifiques aux femmes étrangères victimes de violences.

2014 : Loi du 4 août. Renforcement de l’ordonnance de protection et la généralisation du Téléphone Grave Danger, l’éviction du conjoint violente qui devient la règle dans le cadre de la procédure pénale, la limitation de la médiation pénale à la demande expresse de la victime, l’autorité parentale systématiquement mise en question, la création d’un stage de responsabilisation des auteurs de violences conjugales pour prévenir la récidive, des droits renforcés pour les ressortissantes étrangères, une obligation de formation initiale et continue pour tous les professionnel.le.s en contact avec les victimes de violence.

2015 : Loi du 17 août. Reconnaît le besoin de mesures spécifiques de protection dans la procédure pénale pour les victimes de violences sexuelles et intrafamiliales.

2017 : Loi du 27 janvier. Fait du sexisme une circonstance aggravante des crimes et des délits. Reconnaît aux associations œuvrant sur le champ de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles la possibilité d’exercer les droits reconnus à la partie civile en cas de crime, dans la mesure où elles peuvent justifier avoir reçu l’accord des ayants droit de la victime.

2018 : Loi du 3 août. Renforcement de la protection des mineurs, la présence des mineurs dans le domicile devient une circonstance aggravante, le fait vivre dans le même domicile n’entre plus dans la définition d’une relation de couple.

Allongement le délai de prescription pour les crimes sexuels commis sur mineurs.

Renforcement de l’arsenal juridique permettant de punir les viols et agressions sexuelles commis à l’encontre des mineurs de 15 ans,

Élargissement de la définition du harcèlement en ligne

2020 : Décret du 6 juin 2020. Les victimes de violences conjugales peuvent débloquer par anticipation leur épargne salariale, afin d'avoir rapidement les moyens de s'éloigner de leur agresseur en cas d'urgence et de faire face aux changements matériels imposés par leur situation.

Les principales infractions et les peines encourues

Attention : peu importe que le lien soit présent ou passé

INFRACTIONS PEINES ENCOURUES ARTICLE CODE PENAL JURIDICTIONS
Violences sans incapacité totale de travail (ITT) ou ayant entraîné une ITT ≤ à 8 jours 3 ans d’emprisonnement et
45 000€ d’amende
222-13

DELIT

Tribunal correctionnel

6 ans pour déposer plainte

Violences ayant entraîné une ITT > à 8 jours 5 ans d’emprisonnement et
75 000€ d’amende
222-12
Harcèlement moral De 3 à 5 ans d’emprisonnement et de 45 000 à 75 000€ d’amende 222-33-2-1
Violences habituelles (en fonction de l’ITT) De 5 à 10 ans d’emprisonnement et de 75 000 à 150 000 € 222-14
Agressions sexuelles 7 ans d’emprisonnement et
100 000€ d’amende
222-28
Menace de mort 7 ans d’emprisonnement et
100 000€ d’amende
222-18-3
Violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner 20 ans de réclusion 222-8

CRIME

Cours d'assises

20 ans pour déposer plainte à partir de l'infraction

Meurtre Réclusion à perpétuité 221-4
Viol 20 ans de réclusion 222-24

Dispositifs légaux de protection pour femmes victimes de violences et enfants

POINT ÉCHANGE

Lieu neutre d’échange des enfants à l’occasion de l’exercice des droits de garde ou de visite, sur orientation judiciaire.

INTERDICTION DE SORTIE DU TERRITOIRE DES MINEURS

Mesure judiciaire prononcée par le JAF ou le juge des enfants. A distinguer de l’Opposition à Sortie du Territoire – OST – qui est une mesure temporaire.

AUTORITÉ PARENTALE

Réquisitionnée systématiquement.

ÉVICTION CONJOINT VIOLENT

À tout moment de la procédure pénale ou civile sur saisine du JAF.

DOMICILIATION

Auprès de la police, gendarmerie, cabinet d’avocat ou tout service de domiciliation de droit commun.

TÉLÉPHONE GRAVE DANGER

Dispositif de télé-protection qui dote la victime d’un téléphone à touche préprogrammé qui la met en contact avec une plateforme d’alerte 24h/24. Celle-ci, après géolocalisation diligente les forces de police ou de gendarmerie de proximité.

SIGNALEMENT

  • Auprès du Procureur de la République.
  • Auprès de la cellule de la protection de l’enfance du département.

ORDONNANCE DE PROTECTION

Décision provisoire en urgence par saisine du JAF : éviction du conjoint violent, mesure d’éloignement de l’auteur, d’attribution du domicile et modalités de garde des enfants.

MESURE D’ÉLOIGNEMENT DU CONJOINT VIOLENT

Au pénal, suite à un dépôt de plainte dans le cadre de mesures alternatives aux poursuites, d’un contrôle judiciaire ou d’un sursis après procès. Au civil, devant le JAF ou le Juge des Enfants.

DÉPART DU DOMICILE

Après signalement en police et gendarmerie.