Départ de Catherine Séguin, préfète du Gers pour la préfecture de La Loire

Mis à jour le 03/03/2021

Madame et Messieurs les parlementaires,

Monsieur le président du conseil départemental,

Monsieur le président de l’association des maires du Gers,

Madame la présidente de l’association des maires ruraux du Gers,

Messieurs les présidents des chambres consulaires,

Mesdames et Messieurs les élus,

Mesdames et Messieurs les chefs d’entreprises et représentants d’associations,

Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités,

Mesdames et Messieurs,

Chers amis,

Dans le contexte exceptionnel que nous connaissons, c’est par ce courrier que je m’adresse à vous.

Par décret du Président de la République en date du 29 juillet 2020, j’ai été nommée Préfète de la Loire. Je prendrai mes fonctions le 24 août prochain. Je mesure le très grand honneur qui m’est fait, et la confiance qui m’est témoignée à travers cette promotion en qualité de représentante de l’État, dans un département à très forts enjeux. C’est une heureuse nouvelle, que je reçois avec une grande fierté, mais aussi beaucoup d’humilité et enfin avec, déjà, un sentiment de nostalgie pour ce département du Gers, où j’ai eu la chance de servir en tant que préfète, et que je me dois maintenant de quitter.

Le choix de la carrière préfectorale vaut engagement à se placer à la disposition du gouvernement et à accepter d’être projeté à tout instant, en tout lieu du territoire et pour tout poste, pour incarner la République, la défendre et la servir.

Or, si j’accepte d’emblée cette loi du genre un peu particulière, avec ces contraintes, je ressens au moment de vous quitter une émotion sincère.

On rappelle à l’envi que les préfets n’ont pas droit aux états d’âme.

Certes, mais le cœur ne se commande pas.

Je ne pourrai vous recevoir comme je l’aurais souhaité à l’occasion de mon départ, les règles de distanciation sociale nous imposant une limite stricte du nombre de participants. Sachez que je le regrette. J’aurais été heureuse de vous retrouver autour du traditionnel verre de l’amitié, pour un ultime échange en direct.

J’aurais aimé vous exprimer en personne toute ma reconnaissance pour votre accueil chaleureux, dès le premier jour, et pour votre présence à mes côtés pendant ces 2 ans et 8 mois.

Je quitte dans les prochains jours un département d’exception, aux paysages magnifiques, offrant une qualité et une douceur de vie, des produits du terroir, une gastronomie irrésistible, un goût immodéré pour la fête, le sport, le rugby, les ferias... Autant de caractéristiques qui ne pouvaient me laisser indifférente, et qui font la belle réputation, méritée, du Gers, bien au-delà de nos frontières. Mais le Gers est bien plus riche encore, bien plus varié et surprenant. Durant mon séjour, j’ai pu découvrir un Gers moins connu, plus confidentiel, dont les innombrables atouts ne demandent qu’à être valorisés.

Le bonheur est sans doute dans le pré. Mais le Gers ne saurait évidemment se résumer à cette formule. Il est connu pour sa production agricole, mais sait-on assez que ses agriculteurs ont su se moderniser et s’adapter aux enjeux environnementaux notamment, au point d’en faire l’un des premiers départements de France pour le bio ? Le Gers est, on le sait et on le répète, avec une fierté légitime, un producteur de foie gras d’exception, avec ses 4,5 millions de canards, mais il est aussi le premier producteur d’ail de France et le département qui héberge le plus grand site d’exploitation d’esturgeons à caviar de France. Son industrie agro-alimentaire est porteuse, mais le Gers accueille aussi des entreprises innovantes, équitables, vertueuses en termes de circuits courts, du chocolat au pop corn... des entreprises de pointe dans le secteur aéronautique, pharmaceutique...

C’est cette richesse et cette diversité que je retiendrai de mon expérience dans le Gers.

Je tenais par ce courrier à vous remercier.

Lors de mon tout premier point presse, donné le jour de mon installation le 2 janvier 2018, j’avais annoncé que je voulais être une préfète de terrain, et que mon mot d’ordre et fil conducteur seraient, en toutes circonstances, le dialogue et le travail partenarial.

Je n’en démords pas.

C’est tous ensemble, Etat et collectivités, avec l’ensemble des élus, parlementaires, Président du Conseil départemental, présidents d’EPCI et maires, que nous pouvons réussir et obtenir de faire avancer vos projets de territoire.

C’est tous ensemble, et dans un objectif constant de concorde, de cohérence de l’action publique et de recherche de l’intérêt général, que nous devons, chacun dans le champ de ses compétences et ses prérogatives propres, agir et continuer de travailler.

Sans prétendre à l’exhaustivité, il est quelques périodes marquantes durant mon passage que je retiendrai tout particulièrement, et durant lesquelles vous avez répondu présents. Le mouvement des « gilets jaunes » en est une. Tout au long de cette crise, qui a déstabilisé la France entière, vous étiez aux côtés de l’État. Ensemble, et grâce à la mobilisation exemplaire des forces de l’ordre, nous avons pu préserver notre territoire du pire, et n’en retenir que le meilleur.

Le grand débat national, décidé par le Président de la République, a constitué un exercice démocratique de grande ampleur, sans nul précédent. Dans le Gers, 42 débats ont été organisés, 346 cahiers citoyens ont été déposés à l’initiative des maires pour permettre l’expression libre et la plus large possible de nos concitoyens, sans compter les innombrables contributions écrites. Les Gersois ont été parmi les premiers contributeurs de France au Grand débat national, au prorata de la population.

Depuis le début de la crise sanitaire, crise que nous traversons encore, nous n’avons eu de cesse que de resserrer les liens entre nous, dans un esprit de partenariat. Nous avons mis en place de nouveaux modes de communication, des audio et visio-conférences, qui nous ont permis des échanges riches et réguliers. Nous avons réalisé 5 youtube-live. Chacun des 461 Maires du Gers a été personnellement contacté, 4 fois en moyenne durant la crise. Nous avons répondu à plus de 1200 questions écrites et à d’innombrables appels. Le centre opérationnel départemental a été réuni sous ma présidence 144 fois en 109 jours.

Vous avez répondu présents, sans faillir, pendant cette période si particulière. Vous avez été des acteurs dynamiques, des relais.

Je vous en suis reconnaissante.

Cette relation partenariale que j’ai voulu construire avec vous ne s’illustre pas que dans les crises. Elle apparaît avant tout dans nos réussites et nos accomplissements, qui sont avant tout les vôtres.

Ensemble, nous avons mis en place un maillage territorial de maisons de service au public (MSAP) et maintenant pour certaines labellisées maisons France services (MFS), que beaucoup nous envient. Grâce à votre mobilisation, chaque Gersois se trouve aujourd’hui à moins de 20 minutes d’une MSAP ou d’une MFS, et peut disposer d’une variété de services publics de qualité.

Je souhaiterais conclure mon propos en me référant à un moment d’histoire de ce département, située dans la seconde moitié du XVIIIeme siècle. Un collectif, représentant, je cite, les « bourgeois et manants de la généralité d’Auch », déplorait dans une lettre adressée à l’intendant d’Etigny qu’un projet puisse être envisagé de construire de nouvelles voies de communication, projet susceptible de relier dangereusement le Gers à d’autres territoires voisins et concurrents. L’intendant d’Etigny se voyait supplier de laisser la ville « dans l’heureux isolement où elle est ».

Aujourd’hui, notre département est moins isolé, mais il pâtit encore d’un fort enclavement, qui ne favorise pas l’attractivité du territoire. Depuis mon arrivée dans le Gers, je me suis investie aux côtés du Conseil départemental et des parlementaires pour que la mise à deux fois deux voies de la RN124 puisse avancer : les crédits nécessaires à la réalisation des travaux de la déviation de Gimont, soit 9,6km de route, sont sécurisés. Les travaux se poursuivent.

Lors des 13 visites ministérielles reçues durant mon séjour parmi vous dans le Gers, dont celles du Premier ministre, ce sujet du désenclavement a été systématiquement évoqué, défendu et a obtenu des soutiens précieux qui nous ont permis des avancées notables.

Il est révolu le temps de l’« heureux isolement ». Ne gardons que l’heureux et refusons l’isolement.

Le Gers est un territoire contrasté, complexe, riche de mille atouts, et qui doit continuer de se déployer, de développer de nouveaux projets, de manifester de l’ambition et de croire en son avenir.

Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs, ce fut pour moi un honneur mais aussi un plaisir de pouvoir représenter l’État dans ce département, et d’administrer ce territoire, avec l’appui précieux et de grande qualité des services de l’État déconcentré, et avec votre contribution, toujours active et engagée, aux côtés de l’État.

Ensemble, nous avons créé et entretenu une relation de confiance et de franchise, dont je chérirai le souvenir.

Je repars toujours aussi convaincue que le dialogue et le partenariat doivent être, toujours, la feuille de route entre nous tous, au bénéfice de nos concitoyens.

Mon expérience dans le Gers restera, grâce à vous, toujours gravée dans ma mémoire.

Bien cordialement à vous tous,

Catherine SÉGUIN
Préfète du Gers